SON HISTOIRE... Sisteron a vécu des jours heureux pendant de longues années jusqu'au jour tragique du 14 août 1944. D DAY A SISTERONBombardement du 15 août 1944 par les AméricainsPartout dans le pays, le 15 août est un jour férié appelé Assomption pour les chrétiens, un jour de fête. A Sisteron cette date est synonyme de destruction et de deuil. Le 15 août 1944, la ville fut bombardée par les alliés faisant plusieurs centaines de mots et blessés. Voila pourquoi en ce 15 août 1944, les cigales de Paul Arène se sont tues dans les cœurs des Sisteronais. Si la libération de la Provence s’est faite dans un calme relatif, Sisteron a payé un lourd tribu à cette victoire. Les 4 jours qui ont changé l’histoire de Sisteron. LA FIN DE LA GUERRE 1944, la France occupée résiste tant bien que mal, tandis que ce prépare le débarquement des forces alliées au Nord et au Sud du pays. Le débarquement en Provence a pour but la destruction de la 19e armée Allemande qui défend le Sud de la France. Les Américains poussent vers la vallée du Rhône tandis que l’armée de libération française vise les ports de Toulon et Marseille. En 2 semaines, la Provence sera libérée. Digne et Sisteron seront atteinte le 19 août 1944, Gap le lendemain. Mi septembre, les forces alliés rejoindront celles du front de l’Ouest. Sisteron, 15 août 1944, la ville est calme malgré la guerre, c’est l’été. La rumeur d’un débarquement dans le nord et en Provence a ravivé les esprits. Les gens reprennent espoir, font la fête, promènent dans la campagne, se baignent sur les abords du Jabron et du Buech. Le matin même, la radio annonce que les troupes alliés ont débarqué tout près de St Raphael. 16h20, la sirène retentit, « Encore une alerte ». Ces alertes, les Sisteronais y sont habitués depuis plusieurs mois quand dans le ciel, les avions survolent la ville pour rallier le Nord. Suivant les consignes, les habitants doivent limiter leur déplacement et restent à proximité des abris. Dans la pratique, les habitants ne se cachent même plus, ce qui va malheureusement augmenter le nombre de victimes.
SISTERON, UN INTERET STRATEGIQUE A cette époque, la ville présente un intérêt stratégique certain. La RN 85 qui va de Grenoble à Cannes via Gap, rejointe par la RN75, reliant Grenoble à Sisteron par le col de la Croix Haute passe justement par les rues étroites de Sisteron. La Citadelle sur son rocher surplombe la ville, fermée au nord par la porte du Dauphiné avec ses souterrains et escaliers qui la relie directement. 160 soldats allemands y sont cantonnés équipés de batteries anti-aériennes. La RN85 enjambe le Buech par un pont à 3 arches, avec parallèlement le pont ferroviaire et par le pont de la Baume, la route Napoléon traverse la Durance. 240 BOMBES EN 23 MINUTES ! Dans le ciel, venant du Nord Ouest, 72 bombardiers B26 Marauder du 42e Bomber Wing américains, dont la moitié sont Français survolent la cité de Paul Arène avec pour objectif de couper la retraite à l’ennemi nazi en détruisant les 3 ponts de la ville. Cette opération baptisée « Ducrot » est déployée parallèlement à Arles, Aramon, Avignon, Tarascon, Pont St Esprit et Montfaucon ainsi que sur une soixantaine de batteries côtières Allemandes installées sur la cote. Volant à 4000 mètres d’altitude, les aviateurs ne distinguent presque rien de leur cible. Chaque appareil a dans son ventre 8 bombes de 250 kg d’équivalent de TNT. 36 avions Américains arrivent par la vallée de la Durance pour la 1er et 4e vague et 36 autres Français descendent la vallée du Buech pour la seconde et 3e vague. Ils lâchent leur bombe un peu au hasard. Les premières bombes tombent à 16h20, la toute première serait tombé sur un mariage, mais on n'ignore si il y avait des personnes dessous. . Les accès sont atteints, mais les ponts ne sont pas détruits. Le wing de l'USAAF, forcé à une manœuvre d'évitement après son premier passage se libère des bombes non larguées et plusieurs tombent sur la ville arrosant la place de l’horloge où se trouve la mairie, le centre ville et la Citadelle. Une 3e puis une 4e vague suit avant que l’ensemble de la flotte reparte vers le Sud à 16h40. Au total, en 23 minutes, 240 bombes sont tombées sur la ville. Plan montrant les dégats sur la ville après le bombardement des alliés. Les ponts routiers et le viaduc SNCF sont détruits, comme le moulin bordant le Buech. L'aire St Jaume est partiellement détruite à la sortie Nord de la ville, tout comme la porte du Dauphiné et la moitié de la rue Saunerie, le pont de la Baume et les premières maisons proches. Les bombes ont aussi frappées le quartier de la Coste en bordure de la Citadelle et le centre ville, la place de la mairie. des impacts sont relevés dans le pré du foire, sur le stade, à St Ursule
Au sol, c’est la désolation, l’apocalypse. Un tiers de la ville est détruite. Le pont de la Baume et du Buech sont touchés, le nord de la ville, la voie ferrée, la bordure de la RN 85 et les champs de Sauvaire Jourdan au sud de l’actuelle usine Sanofi. Les bombes américaines sont tombées sur la Citadelle, le centre ville et le quartier de la Coste. Les 2 ponts routiers et ferroviaires sont finalement détruits le 17 aout, l'objectif de ce bombardement. La chapelle de la Citadelle Le pont de la Baume
La partie nord de Sisteron a été entièrement soufflé par les bombes, la moitié de la rue Saunerie est en ruine, la porte du Dauphiné n'est qu'un souvenir...
Les immeubles au bout de la rue Saunerie sont entièrement
détruits ainsi que la porte du Dauphiné. La zone en dessous la Citadelle
a été particulièrement pilonnée. La route Napoléon qui rejoint la Baume
et la rue Font Chaude sont passés dans le lit de la Durance. Dans le
quartier sud de la Baume, toutes les maisons ont été soufflées. Le pont
lui-même est partiellement détruit, seule la voûte est intacte. Sisteron
n’a plus d’eau, les canalisations sur la pente Nord de la Citadelle ont
été coupées. La chapelle gothique et la plupart des bâtiments sur la
forteresse ont été également détruits. La place de l'Horloge, aujourd'hui, place du Dr Robert La port du Dauphiné, elle se sera jamais reconstruite. Le pont de la Baume et le haut de la rue Saunerie. Rue Paul Arène, qui deviendra Avenue Paul Arène. Toutes les maisons de chaque coté ont été détruites par les bombes. A gauche, le faontaine St tropez avec en fond la maison du Dr Robert, decant le restaurant Gailler et la maison de Paul Arène. Au centre, la maison Beck (l'agence de voyage et le salon de thé Canteperdrix) avec en fond , la rue Droite. maison Samuel A droite, vue de la maison de Paul Arène.
4 JOURS DE BOMBARDEMENTS Les bombardements aériens perdurent après le 15 août : le 16 août, des petites bombes sont larguées au dessus de la ville sans faire de victimes. Le 17 août, 24 bombardiers Français atteignent leur objectif détruisant une pile et 2 voûtes du viaduc ferroviaire surplombant le Buech (192 bombes sont lâchées). Le 18 août, une nouvelle tragédie a lieu, le docteur Neil et 3 autres personnes sont mitraillés par des avions Américains alors qu’ils se rendaient à Castel Bevons devenu un hôpital de fortune. Dans la nuit du 18 au 19 août, des petites bombes sont lâchées sur Sisteron par un avion de chass, sans faire de victimes. Le 19 août, la ville de Sisteron est libérée par la Task Force Butler, l’ambiance, n’est malheureusement pas à la fête, les habitants ramassent les victimes.
Au total, ce sont 432 bombes de 250 kg et 23 de 25 kg qui sont tombés sur la ville pendant ces 4 jours de raid détruisant 16 immeubles et 30 maisons. Sisteron totalisait à cette époque 3378 habitants. 106 blessés seront répertoriés par l’hôpital de Sisteron, 21 disparus, 95 morts identifiés, 8 non reconnus, dont 32 enfants. 141 personnes sont mortes sous les bombes alliés. Michel Savoye, originaire de Lille a été pilote d’un des Marauder qui a bombardé Sisteron il y a 70 ans. Son fils en vacances à Veynes raconte : « Mon père avait 24 ans, il était lieutenant pilote commandant de bord. Il n’aimait pas s’étendre sur ce sujet. Chaque fois qu’on traversait Sisteron en vacances, il me racontait par petits bouts son histoire. Il connaissait le coin puisque en 1940 il avait été hospitalisé sur Tallard alors qu’il était pilote sur l’aérodrome. C’est d’ailleurs là qu’il a rencontré ma mère. Mon père et les autres pilotes Français étaient très réticent sur le fait de bombarder la ville, même si l’objectif final était de couper la route aux Allemands en détruisant toutes les voies d’accès. Au confluent du Buech et de la Durance, il y avait pas mal de courant d’air qui allait inévitablement dévier les bombes. » C’est ce qui c’est effectivement passé le 15 août, le premier jour. Largué de 4000 m, les bombes largués des avions US détruisent 1/3 de la ville manquant leur objectif. Le 17 août, les 6 avions français arrivent par la vallée du Buech, volant très bas « à zéro pieds » comme il disait, c'est-à-dire au ras les pâquerettes pour poser les bombes sur le pont. « Mon père n’a jamais su si leur commandant avait eu l’autorisation de voler si bas, au dessus la FLAC (la DCA) allemands. »
LE NOUVEAU VISAGE DE SISTERON Photo de Sisteron quelques années après la guerre, début des années 1950: au fond, les immeubles des Arcades longent le "pré de foire", qui deviendra la place de la mairie en 1964. L'hôpital est derrière à gauche. Au milieu, de gauche à droite, l'école de Verdun et la cathédrale. On remarque tous ces toits et murs portant encore les cicatrices de la guerre. Au premier plan, la Grande place, avec l'horloge et la fontaine St Tropez devant la mairie. Les maisons bordant la traverse Paul Arène ne sont plus. Elles seront reconstruites et la traverse deviendra une avenue se prolongeant jusque devant la cathédrale entre le bar "Henri" et l'immeuble notarial. Janvier 1946, un plan d'urbanisme est soumis au
conseil
municipal: La circulation au travers de Sisteron se fera par
continuation de l'avenue de la gare et place de l'église, avec
démolition des immeubles Esmieul et Richaud détruit par les bombes, pont
sur le Rieu
aboutissant sur la placette près du couvert, la route prendrait la rue
de l'évêché et viendrait aboutir sur la place du marché (la place de la
mairie) pour monter la traverse Paul Arène et se joindre à la rue Droite
où sera édifié une grande place pour stationner les voitures. De là, la
route monterait à la Coste pour aboutir à la placette Lavoir. A quelques
mètres de là, un tunnel conduirait à la rue
Saunerie au point où s'arrête la démolition des immeubles. Une grande
place et un garage serait construit, mais pour conserver le caractère
moyenâgeux qu'avait la porte du Dauphiné, une belle sortie serait faite
au tunnel, laquelle sortie serait dans le style de la défunte porte. La
route reprendrait la course vers Gap. Juin 1947, la municipalité se rend compte de la difficulté pour reconstruire la ville et redonner à Sisteron sa grandeur. Bien avant la guerre, la traversé de la cité était devenue difficile. Un premier projet avait été étudié d'un tunnel rectiligne partant de la place de l'église et aboutissant près du pont du Buech et un autre sur Bourg Reynaud longeait la Durance. Après la destruction des immeubles du centre ville, les "urbanistes" ont proposé un tracé doublant la rue Droite par la Coste et arrivant rue de Provence. Le projet a été abandonné impliquant de nombreuses autres destructions d'immeubles. L'actuel projet consisterait à un tracé utilisant les destructions, ce qui garantirait une traversé de la ville qui n'impacterait pas l'économie et le commerce. 4 ans après les bombardements, Sisteron a un peu pensé ses blessures : les 3 ponts ont été reconstruits, mais il faudra attendre encore quelques années avant que la reconstruction de la ville soit terminée. Au début des années 1950, les travaux démarrent, la ville va changer complètement de visage. A partir de 1954, le tracé de la traversé de la ville est donc modifié. Les maisons détruites en plein centre ville ne seront pas reconstruites. Il faut désenclaver le centre ville. Tout le passage autoroutier se faisait avant guerre par la rue de Provence, la rue Droite et Saunerie, très étroites en direction de la porte du Dauphiné, avec des feux tricolore interposés. Le passage se fera selon l'axe Nord-Sud, facilité par la destruction d'habitations du centre ville. Ainsi né l'avenue Paul Arène qui sera prolongée par le creusement d'un tunnel sous la Citadelle. De nouveaux immeubles sont construit dans le cadre des programmes de réhabilitation de bâtiments privés réalisés et cofinancés par le conseil général. L’ancien pré de foire devient la nouvelle place de la République où
s’élèvera la future mairie en 1964. En face ce sont construit les
immeubles des Arcades. La porte Nord de la ville, celle du Dauphiné ne
sera jamais reconstruite, trop cher. Un grand parking remplace les
maisons qui lui étaient accolées. La chapelle de la Citadelle entièrement
détruite sera reconstruite à partir de 1967 sous l’autorité
bienveillante de l’association chargée du patrimoine du site l’ATM, Art
Théâtre et monuments. Les bâtiments militaires eux ne seront pas
reconstruits. |