PROJET GEMINI

GEMINI VII-VI

Après le vol longue durée qui a marqué l'été 1965, les Américains sont prêt pour tenter un rendez vous mécanique dans l'espace avec une cible automatique, une opération indispensable à la poursuite de la course vers la lune lorsque il faudra amarrer les CSM Apollo avec le LEM. Prévu début 1966, la mission GT6 est avancé, GT7 terminant l'année  en décembre avec un vol de deux semaines la durée d'un trajet terre-lune avec marge de sécurité. Lowell et Borman resteront 14 jours en orbite sans rendez vous avec une cible (peut être avec le second étage du titan, comme aurait du le faire GT4 ou un autre REP comme sur GT5). En fait l'équipage réalisera les expériences annulées lors du vol de Conrad et Cooper. 1966 pourrait être une année avec pas moins de 6 missions (GT8 à GT13). La mission GT8 verra un rendez vous avec une cible Agena comme GT6. Ainsi amarré les deux vaisseaux seront envoyés sur une orbite plus haute. David Scott réalisera deux EVA relié à un filin de 33 m. A la place du pistolet ZIP, l'astronaute sera équipé d'un bloc propulseur avec de véritables moteurs. Le programme des missions suivantes n'est pas encore officialisé, la NASA pourrait aller jusqu'à GT15 avec dans chaque cas un rendez vous en orbite.   

Gemini a été pensé pour les rendez vous en orbite. Pour cela, les ingénieurs ont recherché un système en boucle fermé dans lequel l'ordinateur doit accepter les données du radar, ordonne la manoeuvre, oriente le vaisseau et réalise l'allumage des moteurs. Les astronautes étant garant d'un système automatique. Si le radar tombe en panne ? Si l'ordinateur tombe en panne ? Les astronautes ne seront pas de simple passagers. Ils seront la redondance humaine en cas de panne matérielle. Il a été décidé d'employé un système à boucle ouverte dans laquel le pilote doit entrer les données à l'ordinateur pour procéder à l'allumage des moteurs. Quand groupe de travail STG en 1961 a cherché à déterminer comment moderniser Mercury pour réaliser des manoeuvres dans l'espaced, il est vite aparru que les rendez vous dans l'espace étaient très dangereuse pour un seul homme à bord. Un nouverau vaisseau était nécessaire avec à bord deux pilotes, un pilotant le vaisseau l'autre opérant l'ordinateur et le radar.

Quand Gemini a été conçue, le rendez vous était considéré comme un défi douteux, voire impossible. Il faut beaucoup d'énergie pour faire décoller un vaisseau spatial et contrer la gravité de la terre. Il faut encore de l'énergie pour aller d'une orbite basse à une orbite haute. D'après les lois de Keppler un vaisseau en orbite basse va plus vite qu'un autre en orbite haute. Manoeuvrer en orbite c'est ménager son énergie. Augmenter son altitude, c'est accélérer, la perdre, c'est deccellerer. L'orbite de Hohman est le moyen le plus économique de gagner une orbite plus haute ou descendre sur une orbite plus basse. La trajectoire est une courbe qui est à la fois tangente à l'orbite de départ et celle d'arrivée. Pour Gemini, 4 méthodes sont proposées: insertion directe, tangentielle, co-elliptique et premier apogée.

L'insertion directe permet de lancer le vaisseau actif juste derrière la cible en de s'en approcher au plus près grâce à ses moteurs. Dans le cas du rendez vous tangentiel, la cible est placée sur orbite circulaire et le vaisseau est lancé à la fin de la première orbite et inséré sur une orbite élliptique dont l'apogée est tangantiel à celle de la cible. A chaque orbite, l'apogée du vaisseau est augmenté pour atteindre celui de la cible à la troisième orbite. Dans cette méthode, comme le vaisseau est lancé sur une orbite tangantielle elliptique, le rendez vous a lieu à l'apogée, c'est à dire qu'un vaisseau lancé du Cap réalisera son rendez vous de l'autre coté de la terre. Si le lancement à lieu de jour, le rendez vous aura lieu de nuit. De plus, cette méthode demande d'énormes calcul assujéties à de nombreuses erreurs difficile à corriger en temps réel. La méthode co-elliptique est semblable a la méthode tangentielle dans l'approche, mais l'interception a lieu alors que le vaisseau est sur une orbite co-elliptique juste en dessous de la cible. Sur cette orbite, le vaisseau circule plus vite que la cible et s'en décalle constament. Lorsque les conditions sont bonnes, le vaisseau réalise une dernière manoeuvre dite "phase terminale" pour rejoindre la cible. La dernière méthode est le rendez vous au premier apogée. Le vaisseau est lancé directement sur une orbite dont l'apogée est à l'altitude de la cible. Très technique, cette méthode est aussi assujéti à de nombreuses erreurs et d'un calcul très complexe du moment du lancement.

En 1964, la NASA choisit la méthode du rendez vous co-elliptique. Aidé par l'astronaute Aldrin détenteur d'une thèse en doctorat sur le sujet), les ingénieurs commencent à travailler pour l'adapter à Gemini. La première expérience de rendez vous est catastrophique. GT4 essaie de manoeuvrer pour rencontrer le secons étage du Titan 2. Mc Divitt utilise la technique des pilotes d'un avion intercepteur, approchant la cible par au-dessus et par derrière. Toutes les mises à feu des propulseurs qu'ils tenta ne parvint qu'à placer leur vaisseau sur une orbite toujours plus haute et toujours plus lente et à laisser filer la cible irrésistiblement. Cette approche, en arrière et au-dessus de la cible, fut baptisée "Quadrant de McDivitt", et prouva qu'elle ne pouvait réussir.

Avec la méthode co-elliptique, le rendez vous est réalisé en moins d'une heure. Cette nouvelle stratégie a plusieurs avantages. Au cours de l'approche finale, le pilote n'a qu'à contrôler manuellement la dérive latérale et à freiner pour atteindre les vitesses prescrites aux distances prescrites ; la mécanique orbitale s'occupe du reste. Plus que tout encore, cette stratégie est particulièrement efficace dans les situations critiques : panne de radar, système de contrôle en mode dégradé. Toutes les missions emporteront des piles de graphiques et d'instructions pour les procédures manuelles afin de pallier la perte éventuelle de capteurs ou d'ordinateurs. L'instant précis de l'ultime mise à feu d'approche finale peut être donnée par l'ordinateur de bord où déterminée par l'équipage en mesurant l'angle d'élévation de la cible située au devant et au-dessus. Même dans le cas d'une panne totale d'ordinateur et de perte de liaison radio avec le contrôle de mission, les astronautes pourront utiliser les graphiques pour déterminer où et quand cette importante mise à feu devrait se produire. La dernière orbite de transfert de transfert place le vaisseau "chasseur" sur une trajectoire légèrement en avant de la cible alors qu'il gagne l'altitude de la cible. Puis, à mesure que le vaisseau approche de son apogée, il ralentit en accord avec les lois du mouvement orbital et la cible commence à le rattraper, l'approche finale par le vaisseau "chasseur" se faisant par devant et légèrement par en-dessous de la cible. 

Cette phase terminale a lieu juste après que la cible soit passé dans l'ombre de la terre. Le guidage a lieu en visant les étoiles. L'orbite de la cible est à 258 km d'altitude et le vaisseau est 24 km au dessous. L'approche a lieu dès que la cible passe au dessus en élévatin. Le transfert (TPI Terminal Phase Initiation) a lieu quand la cible est à 27° sur l'horizon local et se tient sur un arc de cercle de 130°. Le rendez vous TPF (Terminal Phase Final). 

 

La mission GT6 est prévue autour du 25 octobre 1965 et sera la 4eme mission habité du programme. Elle prévoit une manoeuvre très difficile, la plus difficile du programme, un rendez vous et un amarrage avec un véhicule Agena, une opération qui n'avait pu être réaliser avec GT5. La mission doit durer deux jours. L'équipage comprend Walter Schirra (Mercury Sigma 7) et Thomas Stafford du groupe 2 avec en doublure Guss Grisson et John Young (GT3).

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La cible Agena sera lancé à 10 h locale du LC 14 sur une orbite à 298 km d'altitude, 28,87°. Une manoeuvre de correction durant l'ascension permettra de faire glisser le plan de l'orbite et gagner 17 mn dans la fenêtre de lancement du GT6.
GT6 sera lancé à 11 h 41 locale sur une orbite elliptique à 161-270 km, alors que l'Agena débutera sa 4eme révolution. Au passage au premier apogée, une première manoeuvre permettra de relever le périgée à 216 km. Du fait de son altitude plus basse que celle de l'Agena, sa vitesse sera plus élevée. Conséquence, elle rattrapera sa cible. La distance entre les deux véhicules sera de 260 km au 3eme apogée. Au 3eme apogée, Gemini circularisera son orbite à 270 km. 
Une heure et 11 minutes plus tard, alors que le vaisseau rentrera dans l'ombre de la terre (soit 5 heures après le lancement), l'orbite sera allongé pour rejoindre celle de l'Agena. Gemini sera alors à 28 km dessous et 63 km devant l'Agena. 33 minutes plus tard, un supplément de vitesse permettra de placer Gemini sur la même orbite que l'Agena à 298 km.
L'amarrage initial aura lieu au dessus des îles Hawai, quelques 6 heures après le lancement à la fin de la 4eme révolution. La procédure de RV sera réalisé avec l'ordinateur et le radar de bord. En cas de panne, c'est le sol qui prendra le relais.

Deux amarrages seront réalisés par chacun des astronautes, en condition jour et en nuit. La jonction durera 7 heures environ. La séparation sera faite 18 h 27 mn après le lancement à la 12eme révolution. Gemini se placera sur une orbite 289-298 km, laissant la cible s'éloigner de 33 km à chaque orbite. Le retour sera commandé 45 heures 10 mn après le lancement à la 29eme révolution. L'amerrissage aura lieu sur l'Atlantique.

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Le premier étage du Titan 2 arrive au Cap Canaveral le 2 août suivit du second le lendemain. La mise en place sur le LC 19 a lieu les 30 et 31 août. La cabine GT6 arrive de l'usine de Mc Donnel Douglas St Louis le 4 et est dirigée vers le Pyrotechnic Bulding de la zone industrielle du KSC. Le vaisseau est équipé des systèmes pyrotechniques ainsi que des sections destinées au RV, à la récupération et à la rentrée (siéges éjectables, parachutes, ...).

Le lanceur Atlas destiné à lancer la cible Agena est arrivé au Cap en décembre 1964. La cible arrive elle les 26-27 juillet. La mise en place de l'Agena et du vaisseau Gemini dans la "timber tower" a lieu le 25 août. Dans cette tour de 15 m de haut sont réalisés des tests de radio fréquence entre les deux véhicules. Le 9 septembre, GT6 est amené sur le LC19 et monté sur le lanceur Titan 2 le 16.

Une simulation complète du compte à rebours est réalisée le 7 octobre avec l'équipage à bord. Pour cette mission, la NASA réalisera deux comptes à rebours simultanée un pour GT6 et un pour l'Agena. Ils démarreront ensemble à J-3 avec le chargement en propergol du Titan à H- 12. La partie finale du décompte est à H-360 mn pour Gemini et H-530 mn pour l'Agena.

 

L'AGENA, UNE CIBLE POUR GEMINI

 

Le badge de la mission GTA 6. GTA signifie Gemini Titan Agena pour le rendez vous avec la cible Agena.

Cette mission endurante est comparée à une course de longue distance: son symbole sur le badge est donc un bras de coureur tenant une flamme olympique. De part et d'autre de la flamme figurent le chiffre romain 7 et la silhouette de la capsule Gemini

 

LE RENDEZ VOUS MANQUE

Le 25 octobre, les comptes à rebours de l'Atlas et du Titan 2 GT6 se déroulent sans problème. A 10 h locales, l'Atlas SLV 3 n° 267 porteuse de l'étage Agena D 5301 décolle du LC 14 de Cap Canaveral. 6 minutes passent et il faut se rendre à l'évidence, le contact  est perdu. La cible n' a pas été placé sur orbite. Le vol GT6 est reporté. Déçus, les deux astronautes Walter Schirra et Thomas Stafford quitte le pad de tir.

Le 28 octobre, revirement à la NASA, le Pt Johnson annonce lui même la décision de faire effectuer un voyage de groupe à GT7 et à GT6 vers la fin de l'année. Durant cette expérience, les deux cabines seront amenées à quelques mètres une de l'autre. GT6 ne sera lancé que 10 jours après GT7. Selon James Web, le patron de la NASA, les chances de succès sont de 50%, l'opération étant plus délicate qu'avec l'Agena.
Le nouveau plan prévoit de lancer GT 7 avec Lowel et Borman pour un vol de 14 jours. 7 jours après GT6 rejoindra la cabine en orbite. Ensemble, les deux vaisseaux manoeuvreront jusqu'à ce rapprocher de quelques mètres, sans s'amarrer. 

Au sol, les techniciens démontent le lanceur Titan 2 et la cabine GT6 du pad 19 pour être mis en stockage. La cabine GT6 n'embarque que des batteries chimiques alors que GT7 des piles à combustible. Le lendemain, un nouveau Titan 2 est installé sur le même pad. La cabine GT7 suivra le 11 novembre. 


Début novembre, la date du 4 décembre est annoncée pour le lancement de GT7. Le MCC de Houston annonce que 7 stations de poursuite seront ajoutées aux 6 existantes, à savoir Canary Islands, Canarvon Australie, Kauai Hawai, Guaymas Mexique, le bateau Rose Knot et Coastal Sentry et des équipes de Houston du Corpus Chriti. Chaque équipe est composée de 4 à 7 personnes (commandant comunicator et médecins). C'est le MCC qui assurera le contrôle en vol des deux vaisseaux. Comme pour les missions précédentes, le RTCC Real Time Computer Complex, la clef du MCC servira de centre informatique. Pendant l'ascension ce sont les radars des Bermudes, du Eastern Test Range via ceux du Cap Canaveral-Houston qui reçoivent les données haute vitesse. Le Centre NASA de Goddard, le NASCOM assure la prédiction de la retombée de chacun des seconds étages du lanceur. Il assure en plus des prévisions de trajectoire au cas où il y aurait une perte de liaison avec le vaisseau. Le centre assure aussi toutes les communications entre les vaisseaux et le MCC au sol (télémétries, données, voix). Il comprend 89 stations dont 34 en mer.

Chaque vaisseau est équipé d'une antenne bande C pour aider les radars au sol à marquer la position de chaque véhicule. Pour identifier chaque vaisseau, les contrôleurs se baseront sur la différences de temps de propagation entre les vaisseaux. Après la mise sur orbite de Gemini 6, les stations du réseau des vols habités Manned Space Flight Network aura pour la première fois simultanément deux vaisseaux en orbite à contrôler. Après le retour de Gemini 6, les stations reviendront en position de base pour terminer le contrôle et le suivie de Gemini 7. Tous les signaux en provenance des vaisseaux (véhicule et équipage) entreront dans les antennes télémétrie du PCM. Les données de Gemini 7 sont contrôlées par le Gemini Systems Monitor Console et celle de Gemini 6 par le Agena Systems Monitor Console.

Les communications voix avec les vaisseaux seront en HF et UHF directement avec les stations au sol ou le MCC. Quand les vaisseaux seront ensemble au dessus du même site, les communications seront reçues simultanément si l'écart entre les vaisseaux vu du sol est inférieur à 20°. Le satellite Symcom 3 assurera les communications en secours.  

Un premier rapport sur la perte de l'Agena explique que c'est au moment de l'allumage de l'étage Agena que les réservoirs ont explosés. En effet pour allumer le moteur, on avait décidé d'introduire d'abord l'UDMH dans la chambre de combustion avant l'acide nitrique ce qui a provoqué la formation de vapeur qui ont remontés à l'intérieur du réservoir augmentant sa pression jusqu'à le faire exploser. Cette méthode d'allumage essayé au sol dans des conditions différentes sera revue.

GEMINI VII PART EN PREMIER

Le but initial de la mission GT7 est et reste un vol longue durée de 14 jours, le double de celui réalisé par GT5. A bord deux astronautes, deux bleu, Frank Borman, commandant et James Lovell, pilote tout deux sélectionné en septembre 1962. L'équipage doublure comprend Ed White (GT4) et Michael Collins du groupe 3.  Le lancement est prévu 4 décembre.

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L'équipage est levé vers 7 heures du matin et prennent un petit déjeuner léger avec jus d'orange, café et toasts. Après un examen médical et un premier point sur le décompte fait par l'équipage de réserve, il déjeuner vers 10 heures accompagné d'une dizaines d'autres astronautes (Young, Conrad, Gordon, Slayton, Scott, Armstrong, Grisson, Shepard, Schirra et Stafford); au menu steak, oeufs, jus d'orange et café.

Après ce déjeuner, les deux équipages se rendent près du LC16 afin de revêtir leur nouvelle tenue spatiale développé pour les vols longue durée. Pesant seulement 6 kg, elles comprennent un casque style "aviateur" avec visière revêtu d'un casque souple. Cet équipement peut être partialement enlevé à bord de la cabine (casque, gants et chaussures) grâce à des zips.   

GT7 est lancé le 4 décembre après un compte à rebours sans histoire. Il est 8 h 30 mn 03 locale quand le Titan 2 12562 quitte la pad 19. Après une ascension nominale, Gemini est placée sur orbite avec un périgée de 161,3 et un apogée de 327 km, 28,87°. Une des premières opérations est de voler de conserve avec le second étage du Titan 2 durant 20 mn à 5-18 m. 


Le périgée est ensuite augmenté à 221,6 km. A la 6eme orbite, les paramètres sont les suivants: 221,4-321,3 km. 206 révolutions restent à faire avant le retour. Au second jour de vol, l'équipage photographie un orage tropical sur l'Océan Indien. Des manoeuvres sont réalisées pour circulariser l'orbite en vue du RV avec GT6 le 5eme jour. Les paramètres sont de 298,4-300,8 km.
Les premières heures de vol sont marquées par une alerte sur la pile à combustible de la cabine. Fort de l'expérience de GT5, un circuit dérivateur à été placé afin de séparer les circuits d'oxygène nécessaire aux astronautes et à la pile. Cette alerte sera de courte durée, Houston considérant un voyant défaillant. 

Au sol, le seul gros problème a gérer est la préparation de GT6. En effet, le Titan 2 Gemini utilise un seul pad le LC19 qu'il va falloir très rapidement reconfigurer pour GT6 après le départ de GT7. Alors que deux mois étaient nécessaire pour préparer un GLV, les techniciens n'ont que 8 jours ! Le 5 décembre, le Titan 2 GT6 est dressé sur le pad 19. Le 8 décembre, un  problème sur une calculatrice électronique retarde le lancement du GT6 prévu le 12 entre le 13 et le 19. Le 9, le lancement est officiellement planifié pour le 12. 

A bord de GT7, la vie s'organise. L'orbite est stabilisée à 299-302 km. Les astronautes sont en "bras de chemise" ayant reçu l'autorisation de quitter leur scaphandre de 7 kg. L'agaçant mouvement de lacet de leur cabine a été neutralisé.

LE RENDEZ VOUS

Suite à la perte de la cible au lancement, le  badge est donc modifié et le sigle "GTA" remplacé.

La forme hexagonale du badge rappelle le numéro de cette mission Gemini-6. Les deux capsules Gemini 6 et 7 sont représentés avec une trajectoire en forme de 6. Le fond étoilé du badge (imaginé par Schirra) contient la constellation d'Orion et les étoiles Sirius, Castor et Pollux (ces deux dernières appartenant à la constellation des Gémeaux ou Gemini en anglais).

Les noms des 2 astronautes figurent sur le badge.

 

Dans les simulateurs du KSC, Schirra et Stafford continuent leur entrainement améliorant sans cesse leur "timing" et leur calcul. Les préparatifs étant terminés plus tôt que prévu, Gemini 6 reçoit le feu vert pour un départ le 12 décembre à 9 h 54 mn 02 s. Alors que GT7 survole le centre spatial et que le décompte arrive à son terme, les moteurs du Titan 2 GT6 sont allumés, la fumée envahit le pad, puis plus rien, le lanceur reste sur place. A 1,2 secondes, les moteurs se sont éteints. Le contrôle sol confirme l'arrêt des moteurs.

Selon les règles de sécurité, Schirra aurait du tiré son anneau de commande provoquant l'éjection de son siège et le catapultant dans une zone de sécurité loin du pad. Mais installé à 30 m du sol, au somment de la fusée, Schirra ne fait rien. L'astronaute racontera plus tard qu'il savait que le lanceur n'avait pas décollé, parce qu'il n'avait pas ressenti les mêmes choses que lors de son vol Mercury. Il avait raison, titan restait droit posé sur ses 4 pieds. Les mots de Stafford ont été plus direct: "Oh, merde!". A bord, tous les signaux électroniques, ainsi que l'horloge de bord, avaient démarré. C'est l'expression habituelle depuis Shepard. On entend toujours quelqu'un déclarer : "L'horloge a démarré ! On a décollé ! L'horloge avait bien démarré, mais il n'y avait pas eu de décollage.

Bien que entrainé à ce genre de situation, l'utilisation des sièges éjectables sur Gemini, aucun astronaute ne voulait en faire l'expérience. L'éjection se faisait avec une force de 20 g. Lors d'un test avec un mannequin, John Young fut le témoin d'un événement spécial. L'écoutille devait être éjecté avant que ne soit éjecté le siège proprement dit. Malheureusement, elle ne s'éjecta pas et le pauvre mannequin dut traverser l'écoutille ce qui fit dire à Young que si un homme avait été à la place il aurait eu un affreux mais court mal de tête! 

99 minutes après l'arrêt des moteurs, les astronautes sont invités à redescendre de leur cabine et a rejoindre leur quartier. Le sang froid de Schirra avait permit de sauver la mission et par la même autoriser une autre tentative. L'enquête va révéler que un capteur n'avait pas mesurer le mouvement du lanceur et avait fermé les valves d'alimentation en carburant. De plus, un ombilical s'est séparé prématurément du lanceur activant la séquence de démarrage. Dans les jours qui suivent, le lanceur est inspecté et la télémétrie analysée. Les techniciens de Aerojet ont découvert qu'un cache poussière avait été laissé en place sur la ligne du générateur de gaz qui a arrêté le moteur une seconde après l'ordinateur. Si cet élément n'avait pas été découvert, la prochaine tentative aurait sans doute avorté et l'équipage se serait sans doute là éjecté. Le générateur de gaz avait été démonté pour être nettoyé à l'usine de Martin de Baltimore et un cache avait été mis sur la ligne à la place. Lors du remontage, le cache est forcé mais personne ne s'en était aperçu lors de la préparation finale. Lorsque le générateur a été démonté les jours d'après, il était endommagé. Nettoyer, il a été réinstallé.  

Les dégâts sur le pad étant mineur, une tentative est programmé pour le 15. Les calculs sont refaits et le 15 décembre à 8 h 37 mn 23 s, GT6 décolle sans problème pour rejoindre GT7. 

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Ayant mis le cap sur la constellation d'Orion et suivant les signaux de leur radar de bord, Schirra et Stafford localisent et rejoignirent leur cible moins de quatres heures plus tard, pour le premier rendez-vous de l'histoire spatial. 

D'une orbite 161-248 km, la cabine passe sur une orbite 161-270 km puis 227-270 km. Elle devient coplanaire trois heures plus tard. GT6 passe sur sur orbite haute à 266-274 km, tandis que GT7 est à 294-298 km, leur écart diminuant sans cesse. une dernière manoeuvre permet à GT6 de s'élancer sur une orbite qui coupe celle de GT7 juste devant la cabine, un léger "coup de frein" permettant de réaliser le raccord parfait pour le rendez vous.  
Stafford (Gemini VI) annonce : "Nous sommes à 36 mètres... " Les deux vaisseaux poursuivent leur approche et les astronautes se font signe à travers les hublots, à moins de trois mètres de distance. 
"Nous avons du monde", annonce Lovell en regardant Schirra manoeuvrer sur les tout derniers mètres. 
"Il y a beaucoup de trafic là-haut", répond Schirra. 
"Faut appeler un agent", suggère Borman.
Schirra utilise alors les informations de son ordinateur de bord (ainsi qu'une dose de "pilotage aux fesses") pour finaliser le rendez-vous avec Gemini 7. Il est 15 h 31, les îles Mariane sont survolées, les vaisseaux sont à 1,5 m de distance. 

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Pendant cinq heures, les deux vaisseaux Gemini volèrent en formation, se dépassant à tour de rôle, et tournant l'un autour de l'autre en lentes pirouettes. Schirra annonce qu'il s'est approché à une distance de 15 à 20 centimètres entre les deux vaisseaux. Pour la première fois, chaque équipage peut voir le vaisseau de l'autre. Comme GT 7 évacue de l'eau par un de ses orifices, Schirra notea : "Vous avez une véritable boule de glace derrière vous." Il signale également que des fils trainent derrière la cabine, ce qui expliquerait les bruits étranges perçus au début du vol par Borman et Lovell. 

Le vol en formation dure 5 h 18 mn, il est assuré par GT6. A leur grand regret, les équipages se séparent. GT6 abaisse son orbite, puis réalise toute une série de manoeuvre visant à rattraper puis fuir GT7 en prévision des rendez vous orbitaux autour de la lune. 

Le 16 décembre, GT6 allume ses rétro-fusées et plonge dans l'atmosphère. L'amerrissage a lieu à 10 h 29 mn à 1015 km au SO des Bermudes à 21 km du Wasp. 

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GT7 reste en orbite jusqu'au 18. Mais l'alarme de la pile à combustible fait craindre un retour anticipé. De plus, l'équipage n'a plus de carburant, juste ce qu'il faut pour rentrer. De plus un moteur d'attitude est en panne. Le 17 décembre, le vol sera mener à terme. la cabine quitte son orbite et plonge dans l'atmosphère le 18 décembre à 14 h 28. L'amerrissage a lieu à 9 h 05 mn avec une grande précision (11 km du Wasp) après un vol de 303 h 35 mn et 13 s. 

Rapidement sortie de leur cabine, les astronautes sont hissé dans un hélicoptère et déposé sur la passerelle du porte avion à 9 h 37, passablement étourdit mais en bonne forme. 

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" Les trois derniers jours sur Gemini VII ont été les plus durs. Ayant utilisé la majeure partie de notre carburant, nous ne faisions plus que culbuter à travers l'espace, jusqu'à ce que nous stabilisions à nouveau l'engin, avant d'attendre d'avoir à le faire à nouveau. On ne pouvait pas faire d'expériences. Nous étions devenus léthargiques au point que la lecture était une corvée. Nous ne fîmes que survivre pendant trois jours. Cela venait après onze jours passés dans un espace très, très réduit. Ce furent trois dures journées.

Les médecins, à tort ou à raison, exagérèrent tous les divers problèmes sur toute la ligne. Ils s'inquiétaient quant au sang qui s'accumulait dans nos jambes. On nous avait dit que nous allions fort probablement nous évanouir à notre retour, dès que l'engin se serait redressé. Je me rappelle avoir regarder Jim en lui disant : "Eh bien, maintenant, ne sommes-nous pas supposés nous évanouir ? Tu le fais ou pas ? "